LAHAD GUEYE, l’avant-garde de la mode sénégalaise
Par SHRINE PERUZ
Avec sa barbe peu fournie, des locks qui balayaient son front, un visage avenant et une allure d’éternel étudiant, Lahad Gueye détonne dans le monde de la mode. Son appartenance à cet univers complexe et passionnant ne se lit pas de prime abord à son apparence. Pas de chemise volontairement ostentatoire ni de veste déconstruite avec art et technicité pour la rendre exceptionnelle. Ses baskets, peut-être, seraient dignes d’un addict de sneakers. L’ordinaire, ce Sénégalais se l’approprie pour mieux exalter l’extraordinaire. Lahad incarne l’avant-garde de la mode sénégalaise, apportant un nouveau langage à un secteur déjà riche en vocabulaire et débordant de styles. Ses créations captivent par leur élégance urbaine chic et leur audace contemporaine. Destinées à une clientèle des générations X et Y, mais aussi à des générations Z averties, ses pièces apportent une autre dimension à la féminité, reflétant l’essence même de son héritage culturel et son profond désir de s’ouvrir à d’autres horizons. Sa marque, Al Gueye, est devenue un gage de spectacle et de désir, ses défilés étant incontournables à Dakar. Une grande partie de ses pairs le convient régulièrement à leurs fashion shows, sachant que l’homme apporte un twist différent et recherché. Emmanuelle Adjovi, Adama Paris, Colle Sow Ardo, « ses tantes » comme il les surnomme avec respect, le chérissent et l’appuient en ce sens. Il est vrai que son approche novatrice et son souci du détail en font une figure incontournable de l’industrie de la mode au Sénégal et au-delà. En quelques années seulement, Al Gueye a conquis le cœur des fashionistas, ses pièces désormais convoitées et admirées en Afrique de l’Ouest, promettent d’envahir d’autres vestiaires panafricains et internationaux. Avec lui, la mode sénégalaise rayonne d’une énergie créative, prête à conquérir les podiums internationaux. Pour répondre à la demande croissante d’une clientèle en harmonie avec sa vision, Lahad se projette désormais dans un univers masculin. Tout Dakar va chavirer, car Al Gueye a réussi à faire une symbiose du quiet luxury et du loud luxury, deux tendances qui affolent les maisons de couture et que certains opposent mais que le jeune Sénégalais fusionne avec doigté.
Lahad Gueye a côtoyé la mode prématurément, sa mère étant propriétaire d’une boutique de fripes, « fouk diaye », dans un marché populaire de Dakar. « Je me souviens que ma maman était d’une élégance extraordinaire car elle avait un don pour choisir les plus belles tenues et les assembler avec beaucoup de goût. Elle était une publicité ambulante pour son business. » Et j’ai pu voir comment un simple habit pouvait donner de l’allure et de la personnalité à quelqu’un. Aussi, quand il décide de se lancer dans la mode, il ne reçoit ni étonnement ni désapprobation de sa famille. « Passe d’abord ton bac et fais des études », exige sa mère. Titulaire d’une maîtrise en gestion des entreprises, Lahad est soucieux de proposer des créations de qualité et refuse de bâcler les finitions, contrairement à un nombre pléthorique de ses confrères et consœurs. Il suit un cursus à l’Institut de la mode en coupe et couture de Dakar, et en sort major de sa promotion en 2011. Ainsi armé de ses compétences et de son talent, il est fin prêt à s’imposer sur la planète mode.
Al Gueye a réussi à faire une symbiose du quiet luxury et du loud luxury